Il y a un an la harpiste Angelica Salvi et moi créions VIVO, une composition musicale originale à 4 mains pour harpe, massage, et un récepteur. De la première à la dernière note, du premier au dernier toucher, nous avons écrit ensemble chaque séquence en accord avec nos inspirations et intentions, harmonisant nos techniques jumelles pour une experience synesthésique de bien-être unique. Dans cette première partie d'un travail en cours, nous massons le dos et traversons une variété d'états d'âmes, débouchant sur une célébration enjouée de la vie. VIVO, en portuguais, signifie autant "je vis" que "un live" lorsqu'il s'agit de musique.
Bien que conçue et destinée à être donnée/reçue en séances individuelles de soins (comme un genre de musique de chambre pour une personne), la pièce a été présentée plusieurs fois en public, notamment à l'occasion d'un cycle sur les différentes manières d'écouter la musique, au musée d'art contemporain de Vigo, en Espagne. A notre heureuse surprise, la réception fut chaque fois très bonne et des retours nous avons appris, que, même sans recevoir comme massé, il se captait beaucoup de VIVO également dans la position de spectateur/auditeur. La bulle de relaxation émet ses notes, ses ondes, jusqu'aux personnes dans la salle et le bien-être diffuse. De plus, le public était enchanté de voir ce que l'on ne voit jamais lorsque l'on est soi-même sur la table: La masseuse, ses déplacements, le ballet des mouvements, l'état de méditation.
Dans une autre phase de notre création / recherche, nous fumes rejointes par l'artiste - performeuse Loreto Troncoso Martinez, déjà proche de nous aux premiers moments de la création, et désireuse d'entrer dans la composition avec sa voix, ses mots, ses soupirs. Cela donna lieu à une représentation unique, fort singulière, au théâtre de Rivoli de Porto.
Ce mois-ci, invitées de nouveau toutes les trois à présenter la pièce dans le cadre d'un programme dédié à la performance contemporaine à la Fondation Serralves à Porto, nous nous retrouvons de nouveau pour poursuivre nos explorations. Samedi 19, à 15h, nous jouerons toutes les trois une version encore renouvelée de VIVO, pour un massé, et pour un public tout à a la fois. A la harpe et au toucher viendront se joindre les rires, les soupirs, les percussions et les surprises de Loreto.
Ainsi, si l'on peut dire, comme nous nous l'imaginons, qu'Angelica à la harpe représente le Ciel, que moi-même au massage je représente la Terre, alors Loreto, double et echo du receveur-rêveur, représente avec nous l'un des trois "trésors" selon la métaphysique Chinoise: L'humanité et tous les êtres vivants qui peuplent l'étage intermédiaire.
A l'occasion de mon prochain séjour à Paris j'animerai 2 ateliers chez Biopulse, et aurai le plaisir de participer à un troisième comme hôte. Voici le programme !
Les ateliers se dérouleront chez : Biopulse Formation Massage 12 Rue Saint Sauveur 75002 PARIS
JEUDI 3 AVRIL: ATELIER TWERK, DANSER À LA DÉCOUVERTE DE SON BASSIN Animé par Fannie Sosa, une proposition de Emily King
Cette atelier propose de partir à la découverte de la région du bassin à travers une
initiation enjouée au twerk, danse « booty » d'origine africaine, caractérisée par un
mouvement rythmique simple prenant sa source dans cette zone. Ce mouvement,
naissant dans la relaxation plutôt que la tension, servira de guide pour l'acquisition et
l'ancrage de connaissances anatomiques de base, vers une conscience corporelle plus
grande et beaucoup de joie de vivre ! Animé par Fannie Sosa*, danseuse, performeuse et
chercheuse, l'atelier sera aussi l'occasion d'aborder cette exploration dans le cadre d'une
réflexion sociale et féministe plus large. Il est ouvert à toutes et tous, hommes et femmes, praticiens et praticiennes bien-être
ou amateurs, en observant les précautions citées ci-dessous. Précautions/ contre-indications particulières : Les exercices seront abordés dans la joie et la douceur en
respect des corps et sensibilités de chacun.e. Toutefois, cette danse pouvant être particulièrement stimulante sur la région du bassin, nous ne la recommandons pas aux personnes blessées ou souffrantes, en particulier de pathologies du système musculo-squelettique (lombalgies, syndrome du nerf sciatique..),
ainsi qu'aux femmes enceintes. Ces personnes restent toutefois bienvenues à s'inscrire assister à l'atelier
pour profiter des autres contenus.
Une interview de Fannie Sosa* ici :
http://retard-magazine.com/le-twerking-rencontre-avec-fannie-sosa/
JEUDI 10 AVRIL : ATELIER L'ARTISTE EST PRÉSENT - Petites leçons d'art contemporain à l'usage des
amateurs et praticien.n.es en massage bien-être.
Dans cet atelier (nommé d'après l'oeuvre de Marina Abramovic) nous n'étudierons pas des
techniques de massage à proprement parler, mais un aspect essentiel de chaque séance
sans quoi la maîtrise des techniques risquerait de toutes façons de demeurer bien fade :
la qualité de présence du practien.ne. Pour explorer ce que peut être notre qualité de présence, comment en prendre
conscience, l'améliorer, nous ferons ensemble des petites exercices et éveils inspirés ou
rejouant des performances d'artistes contemporains, pour qui le corps est le principal
matériau de travail et chez qui la qualité de présence est fondamentale.
Cet atelier est ouvert à tous, praticien-n-es en massage et autres professions du bien-
être, ainsi qu'à toute personne intéressée par le développement personnel, le soin de
l'autre, l'art et la joie de vivre. JEUDI 17 AVRIL : ANTIDOTE(S) AUX USAGES (DOULOUREUX) DE L'ORDINATEUR
Nos modes d’usages des nouvelles technologies et outils de communication affectent nos
organisations corporelles et mentales, de manière superficielle ou profonde, temporaire
ou durable. Il arrive que corps et esprit soient mis à (rudes) épreuves dans ces pratiques,
en particulier sur le long terme, et nous sommes toutes et tous exposé.e.s à des
possibles maux associés à ces usages.
Quelles zones du corps sont affectées, de quelle manière ? Quels gestes en massage
bien-être pouvons nous pratiquer pour soulager des tensions de ce type et prévenir des
maux plus graves ? Quelles habitudes simples pouvons nous adopter et/ou suggérer à nos
clients (étirements, posture, hygiène de vie..) pour que la technologie ne soit pas
geôlière du corps et de l'âme ?
Ces questions seront abordées dans cet atelier ANTIDOTES aux usages douloureux de
l'ordinateur, ouvert à toutes et tous.
Jeudi prochain j'animerai chez Biopulse un atelier intitulé, d'après l'oeuvre de Marina Abramovic: L'ARTISTE EST PRÉSENT, petites leçons d'art contemporain à l'usage des praticiens bien-être. Dans cet atelier nous n'étudierons pas des techniques de massage à proprement parler, mais un aspect essentiel de chaque séance sans quoi la maîtrise des techniques risquerait de toutes façons de demeurer bien fade : la qualité de présence du praticien. Pour explorer ce que peut être notre qualité de présence, comment en prendre conscience et l'améliorer, nous ferons ensemble des exercices simples d'éveils inspirés ou rejouant des performances d'artistes contemporains, pour qui le corps est le principal matériau de travail et chez qui la qualité de présence est fondamentale. Cet atelier est ouvert à tous, praticien-n-es en massage et autres professions du bien-être et/ou toute personne intéressée par le développement personnel, l'art et la joie de vivre.
Marina Abramovic, The Artist Is Present. JEUDI 14 NOVEMBRE - 19h30 à 21h30 Biopulse Formation Massage 12 rue Saint Sauveur 75002 PARIS Inscription obligatoire au 01 44 82 51 29
Taking media analyst Marshall McLuhan's famous theoretical pun that "the medium is the massage" almost to the letter as a staring point, chinese artist Yin Aiwen designs a performance-installation in which massage plays a central part, until the initial statement appears to be reversed, and "the massage" re-installs itself as "the medium". A true human massage ultimately appears as a possible antidote to the panoply of psycho-physical pains quite willingly (=unconsciously?) inflicted to oneself by the modern human, otherwise "massaged" into a disembodied alienation by the soft, gentle, falsely-caring mass media machinery. I as a masseuse happen to think so highly about massage, and this work strikes me as remarkable. I may have a few hesitations about the piece (mostly about the dispositive), still I feel it is conveying important, inspiring, and potentially emancipative material. The dispositive is as follow: Yin Aiwen gives a 15 minutes a chinese medical massage to a participant installed in a massage chair, at the headset of which is installed a tablet playing a video-montage of clips from mass culture. A voice over reads, in a more or less relaxing, therapeutical tone, a text exploring the relationship between media, machines (computers specifically) and the receiver's body, their pain, their vitality, all along questioning them, engaging them in instructive feedback loops with their sensations. A small audience is invited to watch the session. It is almost a clever piece of reverse engineering, Yin Aiwen giving a massage and deducing, from the informations she collects at her expert fingertips, the design of the "end product", the end product here being the human being in the capitalist world... So that she could then re-build this human being, re-model them, correct them, free them from this socio-economical-mechanical blocking ? I have not assisted to the performance myself, so my judgment and impressions are of course limited. I only watched the video documentation, which I find was already quite an experience, and I strongly advise you to watch it ! As for the text, for which I post below a full transcript, it contains some real gems and, in the light of my own experience, it speaks a lot of truth, however in somewhat dark aspects of it.
In the end, the piece altogether appears to be slightly too demonstrative, still too spectacular to my taste and somewhat cruel for the receiver (!) but Yin Aiwen completely admits it, for it serves her purpose exactly: "The harsh, ruthless massage has no interest in your pleasure", she writes. It sure does get the "message"/"massage" across ! However I believe this "message" is in essence one that emerges from all good massage during a private session. Indeed, a good massage will inform you of your condition. Here and now, and before, and even possibly give you an insight on after. It will move and question those layers of histories embedded in your flesh, sometimes it will allow images, memories, dreams, fantasies, to flash behind your eyelids, without a video being necessary. It will present to your consciousness, at your own pace, material very personal, possibly life improving; hints, cues, directions given by your senses to finding yourself again, connecting with yourself so that you be again the one "living" rather than the one being "operated" by. This way of the massage is known, and listened to, by many massage artists, practicians and therapists.This piece speaks to me of the substance of which good unbeatable human massage sessions are made of. Thank you Yin Aiwen ;) Find out more about the Massage is the medium by Yin Aiwen here. Text is by Yin Aiwen. Please give credit if you intend to share/cite it.
Welcome
to the plug in systems.
Your
body will be massaged in a few seconds,
Please
relax...
You
are going to experience a story that is specifically made by you,
enjoy.
Please
relax...
Some
cream will be applied to your neck and shoulders,
It's
going to be fine,
Things
will be nice and smooth...
Good
That's
right
After
your fifteen minutes massage, you'll feel free like never before.
Now
your neck is being touched, does it hurt ?
Have
you noticed this type of pain before ?
I
know you work in front of the computer a lot, picture that scene :
Do
you see your face with the screen light on, glowing in the dark, just
like everyone else ?
You
work late quite often, don't you ?
The
quiet night... Only the sounds of your keyboard is in company.
Do
you feel those blocks here ? It hurts a lot, doesn't it ?
You
must be the kind of person that is constantly thinking, probably
getting annoyed by it sometimes.
Your
tired brain creates this block.
It's
in the way in which your brain gets all the supplies.
So
when it gets blocked, the supplies - oxygen, nutrients, and blood -
will have difficulties to get into your brain.
Tiredness
must be an old friend of yours.
That's
why you need this massage :
To
clear out the scene, to make it work again...
Computers
change you, starting from your hands,
Grow
into your chest, get into your back, then to your neck, and
eventually, to your brain...
I
know you thought that your body was irrelevant, didn't you ?
Otherwise,
you wouldn't let it be like this...
As
if it's just the operator of your mind, and you thought your mind is
eternal,
travelling
in the infinite universe, pluging into the mortal nervous circuits,
being free...
The
strain muscle you have, many people have it nowadays.
It
used to be a professional injury for people doing paperwork.
But
nowadays, almost everyone has it.
Even
children have it.
See
how stiff your front neck is.
It
indicates the condition of your chest
Like
here, the end point of your chest muscles, and the starting point of
your arms'...
Do
you feel how it goes all the way down to the hand that types the
keyboard ?
Your
injured body has become the burden of your digital soul.
It's
ok, many people thought so.
People
say fickleness is the theme of society now
Streaming
tweets, 24/7
Optical
transmission, day and night...
The
facebook « one for all, all for one » utopia, right in
front of your eyes...
Your
fingers dance on your keyboard non-stop
Your
Iphone camera flashes at every corner of your life
Your
exciting brain on wire, all season...
You
are so willing to share yourself to the world,
That
you are pleased to shatter yourself into a hundred and forty
pieces...
All
the consequences then fall on your back,
Sink
into your neck, permeate your brain...
They
change you so quietly that you thought it's your choice.
Do
you see your face with the screen light on, glowing in the dark, just
like everyone else ?
Physical
pain is easy to forget of course.
That's
why you constantly hurt yourself.
Do
you see how badly you have hurt yourself ?
It's
so painful it almost becomes emotional.
Feel
it...
Feel
what has happened to you...
Feel
what the medium has done to you...
Think
about what you have done to yourself...
Can
this pain that you have done to yourself make you regretful ?
The
medium is the massage.
The
sweet exciting kind of massage, catering to your every wish,
Manufacturing
your desire, regulating your recognition,
Until
you can't tell if there is another kind of life anymore...
All
you can see is what has been given,
ALL
that has been given is ALL you can imagine...
In
the world of cyber capital
Everything
is soft, fluffy, gentle, fulfilling...
Like
a massage.
Satisfying
your longing to be cared for, to feel special, to feel loved...
All
you need to do is to pick a set that is all designed.
Yes,
the special design, only for you...
And
a million duplications of you.
You
think this massage is made for you, don't you ?
Like
this, it happens for a reason,
Reasons
that are based on your condition
But
so many people have the same condition,
The
same analysis of you...
I
did it to dozens and dozens and dozens of people.
You
are the same, you are all made the same.
Together
you are precious, together you are special,
Together
you are unique, together you are alone.
It's
not enough that machines code your life.
It's
not enough that they design every inch of your life.
You
will only be perfect when its perspective becomes yours,
Your
only perspective.
Only
then you will have your true freedom :
Boundless,
painless, senseless, heartless...
Do
you see your face with the screen light on, glowing in the dark, just
like everyone else ?
In
this optical fiber world, you are transcendant.
Your
face is flattened after the speed of light.
You
can barely see others faces, and others can barely see yours.
So
you talk as loud as you can, in one way or another,
So
you can grab as many hurried travellers as possible...
After
all, the mass man needs the proof of his living...
So
fifteen minutes of attention is already an extravagance.
If
possible a massive killing weapon is in favour.
So
taking a massage to you becomes a very odd, even uncomfortable idea,
doesn't it ?
You
needed to have so many decent reasons to give yourself in, didn't
you ?
But
you need this massage.
Through
others hands, it reminds you that you are still human.
Through
the pain, it reminds you that you are not entirely numb, yet.
You
are more than the electrical signals from your neurons.
Your
communication with people is more than a faceless P2P transmission.
The
massage is the medium.
This
person behind you, who's touching you, trying to find out what
happened to you,
Do
you see her as a human ?
Two
euros slide in a coin slot, and a piece of hamburger jumps out...
She's
not a walking commodity, providing catalogue services,
But
that's why you felt uncomfortable about the idea, isn't it ?
It's
a better design that pryes your heart with a decent distance...
Have
you noticed the silent communication between you and her ?
Or
are you just struggling to fight with your body, learning about
yourself ?
It's
ok, she knows what you have been through.
Underneath
the fingertips size of skin that she connects to you, your trembling
muscles are shedding a tear...
She
knows.
The
pain you're experiencing is the last mayday your body screams out to
you, do you hear that ?
Feel
it...
Feel
your blood running through your body...
So
powerful, as if you are alive again...
Feel
this warmth inside, as if you are being cared for...
Feel
what is happening now...
Feel
where they came from, and where they will go...
Feel
it, before this massage comes to an end...
I
would like to thank you for dedicating yourself to this experiment.
I
hope it means something to you.
Before
you unplug yourself,
Please
take a deep breath,
And
I would like to ask you : Do you think I am human ?
"Lack of choice makes strain habitual" "As long as superfluous effort is invested in any action, man must throw up defenses, must brace himself to great effort that is neither comfortable, pleasurable, nor desirable. The lack of choice of whether to make an effort or not turns an action into a habit, and in the end nothing appears more natural than that to which he is accustomed, even if it is opposed to all reason or necessity." "Habit makes it easier to persist in an action, and for this reason it is extremely valuable in general. Nevertheless, we easily over-indulge in habits, until self criticism is silenced and our ability to discern is diminished, which gradually turns us into machines that act without thinking." Text: Moshe Feldenkrais, in Health Exercise for Personal Growth. Illustration: Fritz Kahn, Man As An Industrial Palace, 1926 More about Fritz Kahn HERE.
- Il en est de l'acteur comme d'un véritable athlète physique.
– L'acteur est un athlète du coeur.
– Souffle
– Plus le jeu est sobre et rentré, plus le souffle est large et dense, substantiel.
– Alors qu'à un jeu emporté, volumineux, et qui s'extériorise correspond un
souffle aux lames courtes et écrasées. – C'est du monde affectif que l'acteur doit prendre conscience. – Le souffle accompagne le sentiment. – Le secret est d'exacerber ces appuis comme une musculature qu'on écorche. – Toute émotion a des bases organiques. C'est en cultivant son émotion dans
son corps que l'acteur en recharge la densité voltaïque. – Les acteurs en France ne savent plus que parler. ANTONIN ARTAUD, Le théâtre et son double
une sensation de brûlure acide dans les membres, des muscles tordus et comme à vif, le sentiment d’être en verre et brisable, une peur, une rétraction devant le mouvement, et le bruit. Un désarroi incon- scient de la marche, des gestes,des mouvements. Une volonté perpétuellement tendue pour les gestes les plus simples, le renoncement au geste simple, une fatigue renversante et centrale, une espèce de fatigue aspirante. Les mouvements à recomposer, une espèce de fatigue de mort, de la fatigue d’esprit pour une application de la tension musculaire la plus simple, le geste de prendre, de s’accrocher inconsciemment à quelque chose, à soutenir par une volonté appliquée. Une fatigue de commencement du monde, la sensa- tion de son corps à porter, un sentiment de fragilité in- croyable, et qui devient une brisante douleur, un état d’engourdissement douloureux, une espèce d’engourdissement localisé à la peau, qui n’interdit aucun mouvement mais change le sentiment interne d’un membre, et donne à la simple station verticale le prix d’un effort victorieux. Localisé probablement à la peau, mais senti comme la suppression radicale d’un membre, et ne présentant plus au cerveau que des images de membres filiformes et cotonneux, des images de membres lointains et pas à leur place. Une espèce de rupture intérieure de la correspondance de tous les nerfs. Un vertige mouvant, une espèce d’éblouissement oblique qui accompagne tout effort, une coagulation de chaleur qui enserre toute l’étendue du crâne ou s’y découpe par morceaux, des plaques de chaleur qui se déplacent. Une exarcebation douloureuse du crâne, une cou- pante pression des nerfs, la nuque acharnée à souffrir, des temps qui vitrifient ou se marbrent, une tête piétinée de chevaux. Il faudrait parler maintenant de la décorporisation de la réalité, de cette espèce de rupture appliquée, on dirait, à se multiplier elle-même entre les choses et le sentiment qu’elles produisent sur notre esprit, la place qu’elles doivent prendre. Ce classement instantané des choses dans les cellules de l’esprit, non pas tellement dans leur ordre logique, mais dand leur ordre sentimental, affectif (qui ne se fait plus) : les choses n’ont plus d’odeur, plus de sexe. Mais leur ordre logique aussi quelquefois est rompu à cause justement de leur manque de relent affectif. Les mots pourrissent à l’appel inconscient du cerveau, tous les mots pour n’importe quelle opération mentale, et sur- tout celles qui touchent aux ressorts les plus habituels, les plus actifs de l’esprit. ANTONIN ARTAUD, L'ombilic des Limbes, 1925
Pour vous, qu’est-ce qu’un « beau geste » ? Je ne peux imaginer le beau geste que lent. J’aime beaucoup le geste de
prendre des choses invisibles. Il y a toute une énergie dans le beau geste,
une énergie qui ne se résout pas à la surface de la peau. Ce geste serait le
véhicule de beaucoup de choses invisibles.
Claude Jamain, artiste mime, dans un entretien pour la revue Geste.
Ci dessus, extrait du catalogue de geste, de l'artiste Natasha Nisic
Massage au sol sur futon, en tenue souple, séance de 1h30.
Dessin de Seulgi Lee
* ce qui était important pour moi c'était les lignes parallèles entre les quatre membres.
Le massage en images a invité des artistes à participer dans les semaines qui viennent à un projet exploratoire et de rencontre entre les expériences corporelles et plastiques. Le pitch sensation : Sur la base d'un échange, l'invité répond au massage reçu par une création personnelle réalisée dans les heures qui suivent, il n'y a pas d'élaboration par la parole en fin de séance. Initialement pensé pour le dessin, le projet s'est presque immédiatement, et évidemment, ouvert à d'autres formes. A suivre. Première invitéeSeulgi Lee.
Sur l'album South Winds (2002) en écoute ici, l'artiste canadien Christof Migone présente un travail sonore explorant les vents corporels, réalisé en collaboration avec le Petomane. Les artistes confirment que le corps humain est bruyant. Ils l'envisagent à la fois comme émetteur et transmetteur, pas seulement (voire difficilement) comme un contenant.
L'écrivaine fait à travers la maladie une expérience corporelle qui l'invite à réviser ses rythmes, ses impératifs, et à intégrer les perceptions en présence. "Mais la maladie met fin à cette mascarade. Elle oblige aussitôt à s'aliter ou, enfoncé dans de moelleux oreillers sur un fauteuil, à décoller les pieds du sol, ne serait-ce que de trois centimètres, pour les poser sur un autre siège, et alors nous cessons d'appartenir à l'armée des gens d'aplomb: nous devenons des déserteurs. Eux marchent au combat. Quant à nous, nous flottons avec les bouts de bois au gré du courant - pêle-mêle avec les feuilles mortes sur la pelouse, irresponsable, indifférent et en mesure, peut-être pour la première fois depuis des années, de regarder autour de nous, de regarder en l'air, de regarder, par exemple, le ciel." Virginia Woolf, De la maladie (1930), Editions Payot et Rivages 2007